Poèmes sur des toiles de Marie Desbarax, Editions de la Galerie Michel Vockaer, texte liminaire de Caroline Lamarche

Revenir j’aimerais tant

être là toute petite oh ma joie

et fouiner pousser mon museau dans les choses

m’enfoncer jouir au creux des broussailles

des herbes chaudes et plumeuses

le grand poème végétal

comme l’enfant à la tête fêlée qui voulait toujours se perdre

entrer je veux entrer dit-elle tout au fond de la couleur

mon oeil se brise je veux entrer

et boire à même l’eau secrète

l’esprit des fleurs

Reines des près c’est votre odeur qui me grise

m’entre dans la peau me suffoque

fade exquise écrasée

dans mes lointains marécages

lorsque juillet levait ses fièvres ses moiteurs

que l’on sentait dans les ravines

monter un désir d’orage

Epilobes vous dansiez

sur les talus comme des fées

souples et sylphides

qui ploient doucement caressent l’air d’été

j’aimais tant m’enfoncer petite

dans vos buissonnements vos murmures

et regarder la prairie le monde

à l’ombre de vos élégances

voir la nuit en plein soleil

drapée de moire pourpre

et constellée

Et ce blanc des aubépines dit-elle tout ce blanc

comment le fatiguer pour qu’il se donne

pour qu’il soit fleur

et non blanc simplement

que mon geste de le peindre

ne le charge pas ne l’abîme pas

qu’il soit l’abondance mais bien plus que l’abondance

la clarté bien plus que la clarté

simplement le chant sur la toile

une fleur